Le Gabian Déchaîné

LE VOEU : ou La procession de Port-Miou

AJ-procession1936

C’est quoi ? J’aurai du commencer par l’histoire de la Chapelle de Port – Miou. J’y reviendrai un autre jour et il sera facile de relier les deux choses, ainsi que peut-être la recherche du mot Port-Miou.
CASSIS était plus particulièrement placé sous la protection de la Vierge.
La peste fait partie des risques fréquents de l’existence. La quarantaine est très familièrement incluse dans la prévention maritime.
Cassis était fort satisfait d’avoir échappé aux deux grandes épidémies celle de 1580 et celle de 1649.
Cette dernière ayant éclaté à Marseille, au commencement de 1649, s’était répandue rapidement dans les environs.
L’Histoire de l’église de Marseille, par de Belzunce, note que Cassis était touché.
Lorsque les consuls et les habitants, ayant fait vœu de bâtir à l’entrée du port une chapelle en l’honneur du mystère de la Visitation de la sainte-vierge, le fléau disparut.
Le Conseil de la commune, en reconnaissance, vota, le 15 août de la même année, deux cents francs pour la construction de la chapelle à élever à Pormiou.
Le 19 décembre de la même année, Estienne de Puget, Evêque de Marseille, de passage à Cassis, posa la première pierre. La procession partit de l’église paroissiale ou l’Evêque venait de célébrer la messe pour aller jusqu’au lieu choisit.
Le 1 juillet 1651, le même prélat accorda la permission d’y célébrer la messe, en attendant la bénédiction définitive de la chapelle.
La grande peste, dont le germe fut, dit-on apporté de Seyde à Marseille, le 25 mai 1720 par le navire Le Grand Saint Antoine, capitaine Chataud, à qui l’on a imprudemment remis sa patente, laquelle sera falsifiée par la suite.
A Cassis, le 21 juillet, on signale que depuis un mois environ, il meurt plusieurs personnes par des maladies inconnues.
Le 8 septembre Cassis pense encore être épargné et confiants dans la protection divine et espérant être, comme en 1649, préservés du terrible fléau et non point, ainsi que le dit M. de Villeneuve, pour avoir échappé à la peste, les habitants de Cassis obtinrent, par l’entremise de leurs magistrats, que le curé CABROL prononçât le vœu d’aller tous les ans en procession, célébrer la sainte messe à la chapelle Notre Dame de Santé.
Ce n’est que le 18 septembre de la même année que l’on admet enfin la terrible contagion, qui ne cessera qu’au mois de juillet suivant, après avoir fait 214 victimes qui furent toutes enterrées au Bestouan à proximité du vallat des Brayes (actuellement «le jardin d’Emile »)
Cassis a contracté une nouvelle dette, de caractère sacré cette fois.
C’est le vœu de procession annuelle à Notre-Dame de Santé.
La procession initiale n’était pas celle que l’on connaît de nos jours. Elle a subi de profondes modifications engendrées par la disparition des confessions religieuses, par les querelles entre municipalité et clergé, sur la date, etc.….Elle s’est adaptée. Sa date a été fixée le premier dimanche de juillet.
A l’aube du XXI e siècle, cette procession est toujours présente. Cassis a gardé l’antique coutume depuis 1720.
Plusieurs centaines de personnes y participent. Elles partent avant le lever du jour (5 heures de nos jours, il y a quelques années à 4 heures).
Elles se rendent en chantant et en priant jusqu’à la chapelle de port-miou, au bout de la presqu’île ou est célébré une messe en plein air.Les modifications apportées en quelques cinquante ans sont minimes mais significatives.
Seul les huit chants sont restés les mêmes.
La vierge, qui est portée par des jeunes filles ou des jeunes femmes, ouvre de nos jours le cortège. Hier, elle le fermait.
La cloche en tête de procession a disparu. (elle annonçait les pestiférés)
La procession était mieux réglée, c’était deux longues files qui serpentaient jusqu’à la presqu’île, après s’être arrêté au Bestouan pour prier pour tous les morts. Aujourd’hui c’est un flot serré et compact.
La messe est toujours célébrée en plein air. Mais, elle n’est plus suivie de la bénédiction de la mer et des bateaux qui rentraient de la pèche. Notre dame de santé est aussi notre dame du bon voyage.
A l’issue de la messe, un café accompagné de viennoiseries est servi aux participants contre une modeste participation. Puis tout le monde se sépare. Hier, les participants se dispersaient autour de la chapelle pour sortir de leur sac un déjeuner qu’ils partageaient entre amis. Au moment du départ la cloche les rappelait et c’est en procession qu’ils retournaient à Cassis ou une bénédiction terminait le vœu.
Le petit train n’existait pas non plus.
Enfin, la vierge qui est portée est toujours la même. Elle laisse transparaître un coté plus humain, plus maternel, plus filial. Jésus a le regard tourné vers sa mère et Marie regarde son fils.

(AJ/01.07.2001)
Sources :
Les statistiques de la commune de Cassis (Alfred Saurel)
Cassis hier et aujourd’hui
Les lettres de mon grenier.

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Texte de Jacques DUMON :

9 décembre 2013 à 20 h 56 min (Modifier)
Une manifestation miraculeuse à Port-Miou en 1847 ?
La première pierre de la chapelle de Port-Miou, appelée Notre-Dame de Santé ou encore de Bon Voyage a été posée par Mgr de Puget, évêque de Marseille, en procession, le 19 décembre 1649, après que la peste ait éclaté dans la région au début de l’année. La première messe y fut célébrée le 1er juillet 1651. Elle était située à l’entrée de la calanque de Port-Miou en un endroit totalement bouleversé ultérieurement par l’exploitation de la pierre de Cassis.
Cette chapelle fut saisie et vendue sous la Révolution le 24 août 1796 (7 fructidor an IV) au citoyen Mauranchon pour le prix de 252 Francs payable en assignats.
Gênant l’exploitation d’une carrière, elle fut démolie en août 1847, pour être reconstruite l’année suivante vers le nord-est, à son emplacement actuel.
Un érudit local, Mr Autheman (NdR, je suppose sans en être sûr, qu’il s’agissait de Victor Autheman, maire éphémère de Cassis en 1845), voulut garder la mémoire de l’ancien édifice en en relevant le plan et les dimensions avant qu’il ne soit détruit. Voici la narration qu’il a faite de cette opération qui lui réserva quelques surprises. Le préambule est assez savoureux car à cette époque la Science conquérante allait détruire définitivement l’obscurantisme et les superstitions, Mr Autheman se décrivant lui-même dans le texte comme un « incrédule » :
« …fort de l’avenir qui dévoile et explique toutes choses, je n’appréhende plus l’espèce de ridicule qui semble encore s’attacher à celui qui raconte une nouveauté devant ses contemporains, (…) en tout cas, il (ce fait) est bien digne, je crois d’être consigné dans un travail statistique qui vise à l’histoire de tous les faits météorologiques, psychologiques et autres du même genre.
« Le 11 août 1847, on avait commencé à Portmiou-lès-Cassis (sic) la démolition d’un antique sanctuaire dédié à Notre-Dame-de-Santé, construit en 1650 par la piété et la reconnaissance des cassidens.
« Cette chapelle, consacrée par Mgr Estienne de Puget, évêque de Marseille, et à laquelle les paroissiens allaient tous les ans en procession, depuis le vœu solennel de 1720, était un de ces rares monuments de nos pères, qui avaient survécu aux ravages du temps et des révolutions et qui, pourtant, était condamné à disparaitre de nos jours, avec cette particularité déplorable de ne pouvoir laisser après lui aucune trace quelconque, car il était décidé qu’on exploiterait profondément le sol et la roche même sur laquelle reposait l’édifice depuis des siècles !
« Ami de l’antiquité, je formai dès-lors le dessein de conserver sur le papier le souvenir de cet ancien monument.
« Pour cela, il fallait agir sans retard pour mesurer la chapelle avant que la démolition en fût trop avancée. Ce qui me fit décider à partir sans délai le soir même.
« N’ayant strictement besoin que de deux aides pour ce travail, je me fis seulement accompagner par Mlle Rosa Autheman et le premier ami que je rencontrai dans la rue, porté de bonne volonté ; ce fut Mr Louis Dallest, pharmacien.
« Mais comme il était déjà tard et qu’il s’agissait de s’absenter pour quelques heures, je crus devoir, en partant, avertir quelqu’un du but et du motif de notre excursion, afin d’en prévenir nos parents au besoin.
« Or la personne ainsi avertie, voyant que c’était un incrédule qui voulait conserver le souvenir d’un monument religieux, me prédit par trois fois : Que la Sainte-Vierge m’éclairerait !…, A quoi je répondis que je pourrais en avoir grand besoin, la nuit étant assez prochaine.
« Arrivés à Portmiou, nous trouvâmes les démolisseurs travaillant avec zèle à leur ouvrage qu’ils ne quittèrent qu’à huit heures du soir, ayant prolongé leur tâche pour profiter de la fraîcheur du crépuscule.
« Ils avaient déjà renversé la voûte du sanctuaire ; l’avant corps était seul intact.
« Nos opérations s’effectuèrent par la plus belle soirée ; le ciel était serein, parfaitement limpide et sans clair-de-lune ; pas la moindre agitation ne troublait l’air ; on entendait distinctement les éclats de voix des habitants de Cassis, nonobstant une distance de près de trois kilomètres.
« Il était donc environ neuf heures du soir ; toutes les mesures allaient être achevées ; il ne restait plus qu’à relever la dernière encore retenue sous mes doigts, faute de pouvoir la déchiffrer à cause de la faiblesse du crépuscule.
« Mon camarade qui tenait l’extrémité du ruban métrique n’avait pas quitté son poste à l’angle occidental du sanctuaire.
« Lorsqu’au moment où, comptant mépriser la prédiction qui m’avait été faite et porter en même temps défi à la Patronne du lieu contre tout autre moyen d’éclairage, j’appelle mon ami pour me faire battre le briquet, afin d’y voir un peu à la lueur des étincelles.
« Soudain, une clarté vive et subite m’éclaire et me force à porter mes regards vers une énorme traînée lumineuse, apparue tout-à-coup, qui resplendissait silencieusement en face de moi vers le haut du mur méridional du sanctuaire et qui scintillait avec agitation dans un périmètre de 150 centimètres de long sur environ 30 centimètres de large.
« La prophétie était accomplie !…..
« Mais ce n’est pas tout !… A l’instant où, me croyant dupe de mon camarade qui arrivait à moi avec son briquet, je le faisais retourner pour avoir l’explication de toutes ces brillantes figures hyéroglyphiques que je croyais fabriquées par lui, et qui se trouvaient composées d’une infinité de lignes phosphorescentes qui se perlaient et ondulaient en tous sens…..
« Voilà qu’aussitôt l’apparition, subissant une transformation radicale, semble se résoudre complètement et va se contracter en un seul point central qui reluit un instant comme une petite étoile, puis s’allonge immédiatement pour prendre la forme d’une véritable larme de de feu qui commence à couler avec une extrême lenteur sur la superficie du mur, laissant après elle une trace fugitive de 60 centimètres de long, d’abord jaune, puis verdâtre, puis noirâtre, et descendant toujours, tranquillement, sans rien perdre de sa forme, de son volume, ni de sa limpidité, comparable à celle d’une goutte incandescente de cristal fondu !
« Cette larme qui, comme pour nous narguer, vint majestueusement glisser à deux doigts de notre visage, avait environ 18 millimètres de long sur à peu près 5 millimètres d’épaisseur ; sa base, plus large, était arrondie et son sommet presque aigu ; elle n’avait ni odeur ni chaleur, et nous pûmes, pendant près d’un quart d’heure, l’observer et l’examiner avec tout le soin, le loisir et l’attention possible, jusqu’à ce que, enfin parvenue à la base du mur, à quelques centimètres des décombres (sur lesquelles nous étions accroupis), elle parut à nos yeux se diviser en quelques parcelles, puis finit par s’éteindre tout à fait avant d’atteindre le sol, nous laissant tous deux dans l’ébahissement et le désappointement le plus complet.
« Cette singulière apparition, déjà suffisamment remarquable par son étrangeté, parait l’être encore bien davantage par les nombreuses coïncidences qui l’ont précédée, accompagnée et suivie, et dont, pour n’éveiller aucune susceptibilité, il faut se borner à ne citer qu’une principale de chaque catégorie :
« La première : Celle de la prédiction antérieure, improvisée au moment du départ pour la chapelle.
« La deuxième : Celle de la réalisation ponctuelle et précise de cette même prédiction pendant les opérations géométriques.
« La troisième : Celle enfin de la découverte bien extraordinaire d’une petite statue de la Sainte-Vierge, en albâtre, trouvée le lendemain par un des démolisseurs (Joseph Brun, carrier), bâtie dans l’épaisseur du mur du sanctuaire, tout juste à l’endroit de l’apparition.
« La statuette, dont le piédestal a été brisé et égaré par l’ouvrier, a été replacée dans le mur de la nouvelle chapelle, par ordre de Monseigneur l’Evêque.
« Quant aux plus amples détails, ils sont consignés dans la notice dressée par moi, sur la demande d’une personne considérable(*).
« Cette pièce, faite à double original avant d’être déposée, a été affirmée, certifiée et sincère et signée par tous les témoins qui sont : Mr Louis Dallest, pharmacien, adjoint à la mairie de cette ville, Mlle Antoinette Tassy, mère de l’hospice, Rosa Autheman et moi enfin soussigné.
« Cassis, le 25 mars 1854.
« Autheman fils,
Conseiller municipal, ex-économe de l’hospice de Cassis, membre de plusieurs Sociétés, etc. »

(*) J’ignore si ce document, ou au moins le nom de cette « personne considérable » (l’évêque ?) sont parvenus jusqu’à nous. Il serait intéressant de faire une recherche à ce propos dans les archives de l’archevêché de Marseille.
La statuette est bien entendu celle qui est conservée depuis dans la paroisse et proposée à la dévotion des fidèles chaque année lors du pèlerinage du Vœu.



2 Commentaires

  1. Jacques DUMON dit :

    Une manifestation miraculeuse à Port-Miou en 1847 ?
    La première pierre de la chapelle de Port-Miou, appelée Notre-Dame de Santé ou encore de Bon Voyage a été posée par Mgr de Puget, évêque de Marseille, en procession, le 19 décembre 1649, après que la peste ait éclaté dans la région au début de l’année. La première messe y fut célébrée le 1er juillet 1651. Elle était située à l’entrée de la calanque de Port-Miou en un endroit totalement bouleversé ultérieurement par l’exploitation de la pierre de Cassis.
    Cette chapelle fut saisie et vendue sous la Révolution le 24 août 1796 (7 fructidor an IV) au citoyen Mauranchon pour le prix de 252 Francs payable en assignats.
    Gênant l’exploitation d’une carrière, elle fut démolie en août 1847, pour être reconstruite l’année suivante vers le nord-est, à son emplacement actuel.
    Un érudit local, Mr Autheman (NdR, je suppose sans en être sûr, qu’il s’agissait de Victor Autheman, maire éphémère de Cassis en 1845), voulut garder la mémoire de l’ancien édifice en en relevant le plan et les dimensions avant qu’il ne soit détruit. Voici la narration qu’il a faite de cette opération qui lui réserva quelques surprises. Le préambule est assez savoureux car à cette époque la Science conquérante allait détruire définitivement l’obscurantisme et les superstitions, Mr Autheman se décrivant lui-même dans le texte comme un « incrédule » :
    « …fort de l’avenir qui dévoile et explique toutes choses, je n’appréhende plus l’espèce de ridicule qui semble encore s’attacher à celui qui raconte une nouveauté devant ses contemporains, (…) en tout cas, il (ce fait) est bien digne, je crois d’être consigné dans un travail statistique qui vise à l’histoire de tous les faits météorologiques, psychologiques et autres du même genre.
    « Le 11 août 1847, on avait commencé à Portmiou-lès-Cassis (sic) la démolition d’un antique sanctuaire dédié à Notre-Dame-de-Santé, construit en 1650 par la piété et la reconnaissance des cassidens.
    « Cette chapelle, consacrée par Mgr Estienne de Puget, évêque de Marseille, et à laquelle les paroissiens allaient tous les ans en procession, depuis le vœu solennel de 1720, était un de ces rares monuments de nos pères, qui avaient survécu aux ravages du temps et des révolutions et qui, pourtant, était condamné à disparaitre de nos jours, avec cette particularité déplorable de ne pouvoir laisser après lui aucune trace quelconque, car il était décidé qu’on exploiterait profondément le sol et la roche même sur laquelle reposait l’édifice depuis des siècles !
    « Ami de l’antiquité, je formai dès-lors le dessein de conserver sur le papier le souvenir de cet ancien monument.
    « Pour cela, il fallait agir sans retard pour mesurer la chapelle avant que la démolition en fût trop avancée. Ce qui me fit décider à partir sans délai le soir même.
    « N’ayant strictement besoin que de deux aides pour ce travail, je me fis seulement accompagner par Mlle Rosa Autheman et le premier ami que je rencontrai dans la rue, porté de bonne volonté ; ce fut Mr Louis Dallest, pharmacien.
    « Mais comme il était déjà tard et qu’il s’agissait de s’absenter pour quelques heures, je crus devoir, en partant, avertir quelqu’un du but et du motif de notre excursion, afin d’en prévenir nos parents au besoin.
    « Or la personne ainsi avertie, voyant que c’était un incrédule qui voulait conserver le souvenir d’un monument religieux, me prédit par trois fois : Que la Sainte-Vierge m’éclairerait !…, A quoi je répondis que je pourrais en avoir grand besoin, la nuit étant assez prochaine.
    « Arrivés à Portmiou, nous trouvâmes les démolisseurs travaillant avec zèle à leur ouvrage qu’ils ne quittèrent qu’à huit heures du soir, ayant prolongé leur tâche pour profiter de la fraîcheur du crépuscule.
    « Ils avaient déjà renversé la voûte du sanctuaire ; l’avant corps était seul intact.
    « Nos opérations s’effectuèrent par la plus belle soirée ; le ciel était serein, parfaitement limpide et sans clair-de-lune ; pas la moindre agitation ne troublait l’air ; on entendait distinctement les éclats de voix des habitants de Cassis, nonobstant une distance de près de trois kilomètres.
    « Il était donc environ neuf heures du soir ; toutes les mesures allaient être achevées ; il ne restait plus qu’à relever la dernière encore retenue sous mes doigts, faute de pouvoir la déchiffrer à cause de la faiblesse du crépuscule.
    « Mon camarade qui tenait l’extrémité du ruban métrique n’avait pas quitté son poste à l’angle occidental du sanctuaire.
    « Lorsqu’au moment où, comptant mépriser la prédiction qui m’avait été faite et porter en même temps défi à la Patronne du lieu contre tout autre moyen d’éclairage, j’appelle mon ami pour me faire battre le briquet, afin d’y voir un peu à la lueur des étincelles.
    « Soudain, une clarté vive et subite m’éclaire et me force à porter mes regards vers une énorme traînée lumineuse, apparue tout-à-coup, qui resplendissait silencieusement en face de moi vers le haut du mur méridional du sanctuaire et qui scintillait avec agitation dans un périmètre de 150 centimètres de long sur environ 30 centimètres de large.
    « La prophétie était accomplie !…..
    « Mais ce n’est pas tout !… A l’instant où, me croyant dupe de mon camarade qui arrivait à moi avec son briquet, je le faisais retourner pour avoir l’explication de toutes ces brillantes figures hyéroglyphiques que je croyais fabriquées par lui, et qui se trouvaient composées d’une infinité de lignes phosphorescentes qui se perlaient et ondulaient en tous sens…..
    « Voilà qu’aussitôt l’apparition, subissant une transformation radicale, semble se résoudre complètement et va se contracter en un seul point central qui reluit un instant comme une petite étoile, puis s’allonge immédiatement pour prendre la forme d’une véritable larme de de feu qui commence à couler avec une extrême lenteur sur la superficie du mur, laissant après elle une trace fugitive de 60 centimètres de long, d’abord jaune, puis verdâtre, puis noirâtre, et descendant toujours, tranquillement, sans rien perdre de sa forme, de son volume, ni de sa limpidité, comparable à celle d’une goutte incandescente de cristal fondu !
    « Cette larme qui, comme pour nous narguer, vint majestueusement glisser à deux doigts de notre visage, avait environ 18 millimètres de long sur à peu près 5 millimètres d’épaisseur ; sa base, plus large, était arrondie et son sommet presque aigu ; elle n’avait ni odeur ni chaleur, et nous pûmes, pendant près d’un quart d’heure, l’observer et l’examiner avec tout le soin, le loisir et l’attention possible, jusqu’à ce que, enfin parvenue à la base du mur, à quelques centimètres des décombres (sur lesquelles nous étions accroupis), elle parut à nos yeux se diviser en quelques parcelles, puis finit par s’éteindre tout à fait avant d’atteindre le sol, nous laissant tous deux dans l’ébahissement et le désappointement le plus complet.
    « Cette singulière apparition, déjà suffisamment remarquable par son étrangeté, parait l’être encore bien davantage par les nombreuses coïncidences qui l’ont précédée, accompagnée et suivie, et dont, pour n’éveiller aucune susceptibilité, il faut se borner à ne citer qu’une principale de chaque catégorie :
    « La première : Celle de la prédiction antérieure, improvisée au moment du départ pour la chapelle.
    « La deuxième : Celle de la réalisation ponctuelle et précise de cette même prédiction pendant les opérations géométriques.
    « La troisième : Celle enfin de la découverte bien extraordinaire d’une petite statue de la Sainte-Vierge, en albâtre, trouvée le lendemain par un des démolisseurs (Joseph Brun, carrier), bâtie dans l’épaisseur du mur du sanctuaire, tout juste à l’endroit de l’apparition.
    « La statuette, dont le piédestal a été brisé et égaré par l’ouvrier, a été replacée dans le mur de la nouvelle chapelle, par ordre de Monseigneur l’Evêque.
    « Quant aux plus amples détails, ils sont consignés dans la notice dressée par moi, sur la demande d’une personne considérable(*).
    « Cette pièce, faite à double original avant d’être déposée, a été affirmée, certifiée et sincère et signée par tous les témoins qui sont : Mr Louis Dallest, pharmacien, adjoint à la mairie de cette ville, Mlle Antoinette Tassy, mère de l’hospice, Rosa Autheman et moi enfin soussigné.
    « Cassis, le 25 mars 1854.
    « Autheman fils,
    Conseiller municipal, ex-économe de l’hospice de Cassis, membre de plusieurs Sociétés, etc.  »

    (*) J’ignore si ce document, ou au moins le nom de cette « personne considérable » (l’évêque ?) sont parvenus jusqu’à nous. Il serait intéressant de faire une recherche à ce propos dans les archives de l’archevêché de Marseille.
    La statuette est bien entendu celle qui est conservée depuis dans la paroisse et proposée à la dévotion des fidèles chaque année lors du pèlerinage du Vœu.

  2. Jacques dit :

    Il serait intéressant de reprendre dans le livre de Saurel le récit par Mr Autheman, pharmacien à Cassis, d’un étrange et inexplicable phénomène vu pendant 1/4 d’heure le long du mur de l’ancienne chapelle de Port-Miou, et de la découverte, le lendemain de la petite statue de la Vierge en albâtre, à l’endroit même de cette étrange vision.

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